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Jacques Kossowski est député-Maire de Courbevoie, chargé de l'emploi des seniors au sein de l'UMP et fondateur du blog Quinquas+. Il répond aux questions posées par les internautes de Planet.fr sur le thème de l'emploi des plus de 50 ans, lors du chat du 13 octobre 2010 avec Laurent Wauquiez, alors Secrétaire d'Etat chargé de l'emploi.
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Comment pourrait-on faire profiter les entreprises de la richesse que représentent les seniors, sans pour autant imposer des quotas comme pour les salariés handicapés ?

L’idée des quotas peut, de prime abord, paraître séduisante mais elle est en réalité inapplicable. En effet, comment peut-on envisager l’instauration de seuils obligatoires ignorant la taille des entreprises, leur secteur d’activité ou les spécificités propres à certains postes ? Le Gouvernement et sa majorité ont préféré opter pour un dispositif ayant le mérite d’allier la souplesse au volontarisme. Ainsi, la loi de financement de la Sécurité sociale de 2009 a prévu d’inciter – certes, sous la contrainte d’une éventuelle pénalité de 1% sur la masse salariale – les entreprises ou les branches professionnelles à conclure des accords ou à établir des plans d’actions en faveur de l’emploi des seniors. Des progrès substantiels ont déjà été obtenus. Près de 90 accords de branche ont été validés et 31 000 entreprises de plus de 50 salariés ont signé un accord. Nous venons aussi de voter, lors de la réforme de notre système de retraite, l’instauration du dispositif "zéro charges" afin de favoriser le recrutement des seniors. Etant très attaché à la culture de résultat, il me semble important d’évaluer dans le temps l’efficacité de ces mesures. Je suis certain que nous allons obtenir des résultats positifs.   

Précarité et discrimination des 50-65 ans dans le monde du travail

Selon le dernier baromètre de la Dares (août 2010), basé sur les chiffres de Pôle emploi, "le nombre d'actifs de plus de 50 ans inscrits au chômage a bondi de 16,7 % sur un an".

89% des Français âgés de 50-65 ans jugent que l’emploi de leur classe d’âge constitue un vrai problème de société aujourd’hui en France. Cette problématique de l’emploi des seniors apparaît d’autant plus importante que leur valeur ajoutée est très clairement soulignée par les 50-65 ans: 93% des personnes interrogées jugent que les seniors constituent une vraie richesse pour l’entreprise, dont 61% "tout à fait".

Comment protéger les seniors de ce creux fréquent entre licenciement prématuré et allongement de l’âge de la retraite ?

Il convient de souligner ici l’importance de la formation professionnelle. Il s’agit de mettre en place des outils performants permettant aux salariés d’anticiper les évolutions du travail plutôt que de les subir. C’est la raison pour laquelle j’ai fait inclure dans la loi du 24 novembre 2009 sur l’orientation et la formation professionnelle tout au long de la vie l’obligation pour les salariés, dans l’année qui suit leur quarante-cinquième anniversaire, d’être informés sur leurs droits en matière d’accès à un bilan d’étape professionnel, un bilan de compétence ou une action de professionnalisation. De l’avis général, l’âge de 45 ans est un vrai tournant dans la vie active et il paraît logique qu’à ce moment précis, chaque salarié puisse faire le point sur ses connaissances, son expérience, et ses aspirations. N’oublions pas qu’aujourd’hui, après 50 ans, les chances d’accéder à une formation sont divisées par deux. L’objectif est d’intervenir en amont, avant que ne surviennent les difficultés, en faisant un bilan au bon moment, c’est-à-dire quand tout est encore possible. C’est seulement de cette manière que chacun pourra s’adapter aux évolutions, voire changer de métier. Une fois informé de la possibilité de réaliser ce bilan, je précise que le salarié reste bien entendu libre de son choix : il peut ne pas ressentir le besoin, ni même l’envie de l’utiliser.

Politique gouvernementale pour l’emploi des 60-65 ans71% d’entre eux estiment que l’emploi des seniors n’y a pas assez d’importance. Seuls 18% estiment que cette problématique dispose d’une place suffisante.

83% des chômeurs interrogés estiment que la question de l’emploi des seniors n’est pas assez prise en compte dans la politique actuelle.

Comment l’Etat pourrait-il combattre une forme de discrimination intergénérationnelle ?

Ce qui me préoccupe, c’est que cette discrimination à l’emploi est en train de générer une fracture intergénérationnelle. Durant les manifestations contre la réforme de notre système de retraite, j’ai été très frappé par les propos de certains représentants de syndicats lycéens ou étudiants. Ces derniers tenaient un discours opposant les jeunes aux seniors sur le marché du travail. Cet antagonisme entre les générations est simpliste et erroné. Il n’a aucun sens si ce n’est une exploitation politique visant à faire descendre de jeunes élèves dans la rue pour de fausses raisons. En effet, les seniors occupent rarement les mêmes responsabilités que les jeunes recrues. Penser que les postes sont interchangeables est le signe d’une méconnaissance profonde du fonctionnement de l’entreprise. Au contraire, je crois que la mixité générationnelle est un atout pour le dynamisme de nos entreprises. En favorisant un retour à la croissance économique dans notre pays, l’Etat s’emploie de la meilleure façon à favoriser conjointement l’embauche des jeunes et des seniors.     

Discrimination dans la société80% des répondants estiment les seniors discriminés au sein de la société en général (dont 24% "beaucoup"), prouvant par là-même que le problème de l’emploi des seniors s’inscrit dans le cadre plus large d’une société française qui peut nourrir un rapport difficile avec ses aînés.

Pour en savoir plus: Jacques Kossowski était l'un des invités de l'émission "le Code Risoli" sur Sud Radio le 3 novembre dernier.  Alors que la France était secouée par le débat sur le projet de réforme des retraites, Philippe Risoli a consacré plus d'une heure d'émission sur la question de l'emploi des seniors.