Christian Bourreau, président de l'Union Française des Retraités Régime Général, réagit au document d'orientation sur la réforme des retraites transmis le 16 mai dernier par le ministre du Travail Eric Woerth aux partenaires sociaux.

Eric Woerth : de bonnes paroles, mais...

Ne boudons pas notre plaisir. Monsieur Woerth prend un certain nombre d'engagements qu'il convient d'abord de saluer : maintien et consolidation du système par répartition, pas de baisse des pensions actuelles et futures, pas d'augmentation généralisée des cotisations sociales et des prélèvements obligatoires, pas d'amputation du pouvoir d'achat des actifs et préservation de la compétitivité. Eric Woerth s'engage en outre à ce que les changements s'opèrent progressivement et à poursuivre la lutte pour améliorer le taux d'emploi des seniors. A ce sujet, il remarque que si la situation française est inférieure de 15 points à la moyenne européenne pour la tranche d'âge 60/64 (conséquence de la retraite à 60 ans), elle est dans la moyenne pour les 55/59.

La démographie est la cause structurelle des déficits, aggravés par la crise et le Papy Boom. L'allongement de l'espérance de vie, 15 ans supplémentaires en 60 ans, est une excellente chose, mais il réduit le rapport cotisants-retraités. Il était de 4 en 1960. Il est de 1,7 actuellement et devrait descendre à 1,5 en 2020.

Le cœur du document d'orientation consiste donc à améliorer ce rapport, c'est-à-dire à allonger la durée d'activité, ce qui réduit ipso facto le temps de la retraite et améliore le rapport. Eric Woerth ne se prononce pas sur la méthode à utiliser, augmenter la durée de cotisation ou repousser l'âge minimum de départ en retraite, mais il a certainement lu le dernier rapport du COR qui montre que la seconde méthode est plus rapide et plus efficace. Pour la seule CNAV, le report progressif de cet âge jusqu'à 65 ans réduirait le déficit en 2030 de 59 % (14,2 milliards € au lieu de 34,7 attendus).

Mais, l'abondance des engagements et le caractère manifestement insuffisant des mesures d'âge, conduisent à regretter que le document ne soit pas plus indicatif sur les autres mesures de nature financière qui devront être prises pour assurer l'équilibre des retraites à l'horizon 2020 ou 2030 surtout si, comme cela serait souhaitable, les mécanismes de solidarité sont renforcés. Réduction des niches fiscales et élargissement de l'assiette des cotisations apporteront sans doute une modeste contribution, mais l'essentiel viendra peut-être de cette contribution supplémentaire de solidarité sur les hauts revenus et les revenus du capital. Gageons que les titulaires de hauts revenus devront être nombreux à payer la note.

Mais, l'évocation d'une réforme systémique qui, chacun le sait, ne résoudrait pas le problème de financement, n'est que très timidement faite. On peut le déplorer car elle serait de nature à améliorer la visibilité des régimes et elle serait également l'occasion de réduire les inégalités flagrantes qui subsistent entre les régimes. Le document annonce la poursuite de la convergence entre les régimes du privé et du public. Attendons de voir et rappelons qu'en 2004, la pension moyenne d'un salarié du privé était de 1065 € alors que celle du public était de 1689 €.

En conclusion, un document intéressant, mais le plus dur reste à faire.