Assurance vie : les bons réflexes à avoir en temps de criseIllustrationIstock
INTERVIEW. Alors que le CAC 40 est au plus bas et que l'incertitude face à la crise sanitaire engendrée par le nouveau coronavirus demeure, les épargnants s'interrogent : peuvent-ils débloquer une partie de leur butin placée dans un contrat d'assurance vie ou doivent-ils au contraire investir en unités de compte ? Karl Toussaint du Wast, cofondateur de netinvestissement, nous donne les clés pour bien réagir, en fonction des profils.
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Quelle attitude adopter face à la crise ? Si nombreux ont été les Français à faire preuve d’une extrême prudence quant à leur épargne depuis le début du confinement, ce n’est pas forcément la meilleure manière d’agir. Un surplus d’épargne d’au moins 55 milliards d’euros placés dans des Livrets A et autres LLDS a d’ailleurs engendré des inquiétudes au sein du gouvernement, qui craint la non-circulation des sommes amassées. Cela pourrait constituer un obstacle majeur à la reprise économique.

En revanche, l’assurance vie n’a pas connu le même succès. D’après la FFA (Fédération française des assurances), la collecte nette (les dépôts moins les retraits) de l'assurance vie en mars 2020 est négative (- 2,2 milliards d'euros). En cause, une grande diminution des dépôts (-27% par rapport à mars 2019) mais aussi une forte augmentation des retraits (+12% par rapport à mars 2019). Selon l'analyse du Cercle de l'Épargne, "les commerçants, les artisans et les professions libérales qui sont, en moyenne, bien équipés en contrats d'assurance vie, doivent faire face à des pertes de revenus, ne pouvant plus pour un grand nombre d'entre eux exercer leur métier. Cette situation explique également la progression des prestations, certains assurés, pouvant avoir besoin de liquidités pour faire face à des échéances incontournables". Certains versements prévus par les détenteurs d’assurance vie n’ont également pas pu être effectués, en raison du confinement de leurs conseillers, rapporte Boursorama.

Les Français ont-ils alors surréagi ?

Assurance vie : une prudence accentuée non pas "par panique mais par méconnaissance du marché financier"

"Selon moi, ils n’ont pas cédé à la panique. Ils sont à l’image de leur réflexe historique, habituel et culturel en France. Les Français sont de très gros épargnants mais des épargnants extrêmement prudents du fait de leur méconnaissance du marché financier", explique Karl Toussaint du Wast, cofondateur de net-investissement.fr.

"Et si on ne comprend pas quelque chose, généralement, on ne va pas être tenté de s’y aventurer. Ainsi, s’ils ne comprennent ni la crise, ni les marchés, ils ne prendront pas l’initiative d’investir, à moins d’être accompagnés par un professionnel", ajoute-t-il.

"Cette absence de culture financière - liée à l’éducation- a engendré des collectes historiques sur les livrets d’épargne de précaution (Livret A et LLDS), totalement inutiles économiquement et en termes de rendement (O,5% annuel). En revanche, dans le Nord de l’Europe et les pays scandinaves, nombreux ont été ceux qui sont revenus sur les marchés financiers", note le cofondateur du site de conseil en gestion de patrimoine.

Quels réflexes doivent alors adopter ceux possédant un contrat d’assurance vie ?

Assurance vie : "Si vous avez besoin de liquidités, piochez dans votre fonds en euros"

"Contrairement à la légende urbaine, votre contrat d’assurance vie n’est pas bloqué les 8 premières années. C’est un sous-entendu subtil de la part de certaines banques qui peut le laisser penser. Les Français font toutefois l’amalgame entre le fait de garder son assurance vie 8 ans pour bénéficier d’un abattement fiscal, et le fait de ne pas pouvoir la clôturer. Vous pouvez pourtant récupérer votre argent librement et à tout moment. Seule la Flat tax de 30% sur la plus-value devra être réglée", précise Karl Toussaint du Wast. Si vous avez un besoin de liquidités vous pouvez donc piocher dans votre assurance vie. Actuellement, la transaction peut se faire en une quinzaine de jours.

Attention toutefois, si vous avez des positions en unités de compte et qu’elles ont accusé une baisse importante "ne les soldez pas, les taux vont finir par remonter même si cela doit prendre un an ou deux".

"N’acceptez pas d’encaisser -30% ou -40% tout de suite, cela serait une erreur, voire un manque de respect pour votre épargne", prévient-il. "Prenez plutôt des fonds sur votre fonds en euros. Son capital est garanti est ne rapporte quasi rien."

Un arbitrage (ordre de rachat ou de transaction), envoyé par mail n’a pas été traité par l’assureur ou la banque en temps voulu ? Pas d’inquiétude, "la date du mail fera foi. Une éventuelle compensation devra être prise en charge par l’organisme lors de l’exécution de l’ordre, c’est inscrit dans le droit des assurances", complète-t-il.

L’assurance vie offre-t-elle par ailleurs des opportunités en ces temps de crise ?

Assurance vie : "Tournez-vous vers les unités de compte"

Selon Karl Toussaint du Wast, il est dans l’intérêt de l’investisseur de "se tourner vers les unités de compte, plus que jamais et pour plusieurs raisons". En effet, il estime que la "probabilité de performer de manière significative à l’échéance de 3 à 5 ans est conséquente. Avec le niveau actuel des marchés (très bas), si vous vous donnez ce temps, il y a 99% de chances que les performances se situent à 10%, 20% ou 30% de gains. En comparaison, un fond euros ne vous rapportera qu’entre 0 et 1%", indique le gestionnaire de patrimoine.

Secondo, "nous sommes toutes et tous en quête de sens (dans nos achats, notre vie, et pourquoi pas dans nos investissements). Investir dans les unités de compte aujourd’hui revient à être un acteur de l’économie réelle. En prenant des unités de compte au sein d’entreprises franco-européennes, vous aidez en effet à maintenir les emplois, à relancer l'économie… La décote actuelle de 30 à 40% offre aux petits épargnants la probabilité de gagner beaucoup d’argent à moyen terme (3 à 5 ans). Cette action est donc bonne pour le client et les entreprises", constate-t-il. "Au-delà de la satisfaction financière ou capitalistique du profit, vous donnez de cette manière du sens à vos investissements", poursuit-il.

"En revanche, ne surréagissez pas à la moindre fluctuation de l’action. Il faut rester rationnel, froid, ne pas laisser l’affect guider vos décisions. Il ne faut pas paniquer si une valeur que vous achetez perd 30%. Elle finira par remonter, et peut-être même très haut. Ce n’est qu’une question de temps", prévient le cofondateur de netinvestissement.

Pour ceux qui ont envie d’investir mais qui éprouve toutefois quelques réticences, il existe des alternatives que voici.

Assurance vie : visez la pierre papier ou les produits structurés

Pour les investisseurs qui ont conscience qu’il existe des opportunités mais qui souhaitent rester prudents, il existe un compromis : la SCPI (Société civile de placement immobilier) ou OPCI (Organisme de placement collectif en immobilier). "Ces produits dits de pierre papier, que l’on peut loger dans l’assurance vie, offrent le double intérêt de très bien résister et de pouvoir atteindre 2 à 3% de rendement. Cela n’est certes pas garanti mais l’immobilier demeure peu volatile", analyse l’expert.

Autres possibilités pour les clients conservateurs, les produits structurés. "Ces produits financiers que l’on peut aussi loger dans l’assurance vie, permettent de connaître dès le départ, le rendement possible (jusqu’à 10%) et la barrière de protection (limite en pourcentage au-delà de laquelle votre capital est en danger). Cela permet de protéger votre capital. Dans une phase de transition éducative, le produit structuré est très intéressant car évite l’inquiétude de la fluctuation", assure Karl Toussaint du Wast.

Attention toutefois, ces produits entrent dans la catégorie des produits financiers complexes ; veillez donc à vous faire accompagner par un professionnel.