Communication, adaptabilité, vision d’ensemble ... Le thème astral de François Bayrou nous donne les prévisions des astres pour son début de mandat de Premier ministre. Stanislas Delorme, consultant intuitif,...
"Les autoroutes, ça ne leur suffit pas pour faire du fric sur le dos des automobilistes !", s'agaçait récemment un certain Jean-Luc Mélenchon, prenant les armes sur Twitter après la récente publication d'un article du Monde, s'attardant sur le décret paru en toute discrétion le 14 août 2020. Ce dernier, explique Ouest-France, est "relatif aux conditions de classement de certaines sections de routes dans la catégorie des autoroutes" et a été publié dans les colonnes du Journal officiel. Comprendre ? Il permettra dorénavant à l'État de se désengager de certaines routes nationales - ou au moins de tronçons - au profit du privé. Sans grande surprise, ce sont les concessionnaires autoroutiers qui ont tout à gagner d'un tel arbitrage. Le quotidien régional n'hésite d'ailleurs pas à parler de "cadeau".
Les routes vont-elles devenir payantes ? La réponse (incomplète) du gouvernement
Une question demeure, cependant, soulevée notamment par le patron des Insoumis : concrètement, quel impact cette décision pourrait-elle avoir sur les Françaises et les Français contraints de prendre la route plus ou moins quotidiennement ? Faut-il s'attendre à des péages à l'entrée de chacune des portions de route concernée ? Jean-Baptiste Djebbari, ministre des Transports du nouveau gouvernement Castex, s'est empressé de répondre : "Jean-Luc Mélenchon prête au gouvernement des intentions qu'il n'a pas. Nous n'allons pas rendre les routes nationales payantes".
Si rassurants ces quelques mots puissent-ils être pour les millions d'automobilistes qui arpentent les chemins d'asphalte du pays, ils n'en restent pas moins inexact affirme encore une fois Ouest-France. D'après les experts interrogés par le quotidien, les Françaises et les Français devront bel et bien mettre la main à la poche… Certains parlent même d'un "impôt masqué" ! "Le ministre omet simplement de dire que le contribuable y perd", assène par exemple David Cayla, enseignant-chercheur en économie à l'université d'Angers. Explications.
Allez-vous devoir payer un nouvel impôt "masqué" pour pouvoir rouler ?
"Ce décret vise à encadrer un vieux projet du gouvernement pour se décharger du coût de rénovations des portions d'autoroute, avec en échange la prolongation des concessions autoroutières", décrypte d'entrée de jeu David Cayla, sollicité par le quotidien. En pratique, le texte publié au Journal officiel détaille "les conditions dans lesquelles les sections à gabarit routier peuvent être classées dans la catégorie des autoroutes" et concerne les voies "se situant dans le prolongement direct d'une autoroute, qui n'ont pas pu bénéficier d'un aménagement 2v2 voies et chaussées séparées en raison des contraintes topographiques".
Le deal passés avec Vinci, Eiffage et Abertise comprend la prolongation des concessions qui leurs sont accordés, en dépit d'ailleurs de l'avis rendu par le Sénat. Les trois groupes "vont encore gagner énormément d'argent sur le dos des usagers", résume Pierre Chasseray, le délégué général de l'association 40 millions d'automobilistes. Fondamentalement, les usagers de la route vont continuer à voir les prix à augmenter des années durant - bien plus que cela n'était initialement prévu… C'est en cela qu'il parle d'un "impôt masqué". "Evidemment qu'on va taxer le budget des Français !", s'offusque-t-il encore.
Et l'économiste, cependant, de tempérer : l'usager va payer, c'est certain, "mais il ne le verra pas". "Les péages vont augmenter, comme les années précédentes, pas nécessairement plus. Cela ne se traduira pas par de nouveaux péages, ni par des routes nationales payantes, mais les conséquences sur le portefeuille des automobilistes se verront sur le long terme."
Une décision qui fait sens au vu de l'intérêt collectif ?
"L'Etat s'est privé d'une manne très rentable et par ce décret, il continue de le faire, pour encore longtemps", résume sobrement David Cayla. L'intérêt de cette mesure pour le bien collectif n'a donc pas l'air évident.
Les grands gagnants ne sont pas difficile à identifier. Il s'agit évidemment des concessionnaires qui continueront à profiter de l'argent des péages pour renflouer leurs caisses. "Ce qui me choque, c'est la myopie de l'Etat, qui se concentre sur le court terme, et va perdre des recettes à long terme", poursuit l'économiste. Et Ouest-France de rappeler le rapport de la commission d'enquête du Sénat, qui chiffrait à 7,8 milliards d'euros le manque à gagner pour la France. D'ici à 2036, Vinci, Eiffage et Abertis devraient avoir engrangé quelques 32 milliards d'euros de bénéfice. Le cadeau interroge d'autant plus que l'Etat est sans cesse en recherche de financements… et va parfois jusqu'à amputer certaines dont profitent les Françaises et les Français.