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Le Canard Enchaîné a frappé un grand coup pendant la dernière campagne présidentielle avec l'affaire Pénélope Fillon. En 102 ans d'existence, l'hebdomadaire a été l'origine de nombreuses révélations qui ont fait et défait les politiques. Retour sur les plus gros scandales révélés par le journal satirique. 
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La feuille d'impôts de Jacques Chaban-Delmas, en 1972

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L'affaire éclate en 1971. Cette année-là, Le Canard Enchaîné publie un avertissement de la trésorerie du XVIème arrondissement de Paris mettant en cause celui qui est alors Premier ministre, Jacques-Chaban Delmas. On y apprend que ce dernier paye un impôt sur le revenu de 16 809 francs pour un revenu imposable de 72 400 francs, ce qui est jugé très bas par le journal. Un an plus tard, Le Canard enfonce le clou en dévoilant que l'intéressé n'a en fait pas payé d'impôts entre 1966 et 1969.

Le processus est en fait légal, puisque Jacques-Chaban Delmas bénéficiait d'un "avoir fiscal". Seulement voilà, les journaux de l'époque parle d'un "scandale collectif" et d'un système privilégiant les plus riches. L'ancien maire de Bordeaux est évincé de la course à la présidentielle de 1974 au profit de la candidature de Valérie Giscard d'Estaing. 

Les diamants de Bokassa, en 1979

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Le 10 octobre 1979, Le Canard Enchaîné révélé que le président de la République, Valérie Giscard d'Estaing, s'est fait offrir des diamants par le dictateur centre-africain, Jean-Bedel Bokassa. D'une valeur estimée à un million de francs par l'hebdomadaire (ce qui a été contredit par des experts par la suite), l'ancien chef d'Etat aurait reçu les bijoux en 1973, lorsqu'il était ministre des Finances. Finalement, après avoir consulté ses conseillers, Valérie Giscard d'Estaing ne fait aucun démenti.

Le 17 octobre qui suit, Le Canard Enchaîné rapporte que d'autres diamants lui ont été offerts par le dictateur en 1970 et 1972. Le 27 novembre 1979, le président décide finalement d'accorder une interview à trois journalistes, mais il n'évoquera que très peu ses relations avec Bokassa. Révélée deux ans avant la présidentielle de 1981, l'affaire des diamants a participé au discrédit du président sortant qui perdra face à François Mitterand au soir du 10 mai 1981. 

L'affaire Maurice Papon

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Le 6 mai 1981, en plein entre-deux-tours de l'élection présidentielle, Le Canard Enchaîné publie un article mettant en cause Maurice Papon, alors ministre du budget, dans la déportation des juifs français pendant la Seconde guerre mondiale. Durant le conflit, Maurice Papon était secrétaire général de la préfecture de Gironde, et deux notes signées de sa main et l'incriminant ont été retrouvées par le journal satirique. L'ex-ministre demande alors la consititution d'un jury d'honneur dans le but d'être innocenté.

Celui-ci "donne acte à M. Papon de ce qu'il fut bien affilié aux Forces françaises combattantes à compter du 1er janvier 1943 et attributaire de la carte du combattant volontaire de la Résistance." Néanmoins, des enfants de déportés portent plainte contre Papon en 1983 et celui-ci sera finalement inculpé le 19 janvier 1983. Cependant, son procès ne s'ouvre qu'en 1997. Il est condamné en 1998 à dix ans de réclusion criminelle. Après s'être enfui en Suisse, il sera écroué en 1999 mais sortira de prison en 2002, du fait de son état de santé. 

Le prêt de Pierre Bérégovoy

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En 1992, Pierre Bérégovoy est nommé Premier ministre par François Mitterand. Un an plus tard l'affaire du "prêt Pelat" est révélée par Le Canard Enchaîné. L'hebdomadaire publie un article expliquant que le chef du gouvernement a bénéficié, en 1986, d'un prêt d'un million de francs sans intérêt de la part d'un ami de François Mitterand, Roger-Patrice Pelat, pour s'acheter un appartement dans le XVIème arrondissement de Paris.

Le Premier ministre est alors accusé de n'avoir jamais remboursé son emprunt dont on pense qu'il s'agit d'un pot de vin. Par ailleurs, Roger-Patrice Pelat est impliqué, comme Pierre Bérégovoy, dans le scandale politico-financier de l'époque, l'affaire Pechiney-Triangle. Le prêt s'avérera finalement être tout à fait légal et Pierre Bérégovoy le remboursera avec ses indémnités ministérielles et la vente d'objets de collection. Cependant, le mal est fait. Discrédité aux yeux de l'opinion publique, Pierre Bérégovoy meurt dans d'étranges circonstances le 1er mai 1993, un mois après la défaite de la gauche aux législatives. L'enquête de police établira qu'il s'agissait d'un suicide. 

L'affaire Michèle Alliot-Marie

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Fin janvier 2010, Le Canard Enchaîné révèle que Michel-Alliot Marie, alors ministre de la Défense, a passé ses vacances de fin d'année en Tunisie, en plein Printemps arabe. MAM a effectué deux trajets en jet privé avec un hommes d'affaires, proche du très contesté président Ben Ali, Aziz Milled. Les médias pointent alors la proximité de la ministre avec le chef d'Etat tunisien. Quelques jours plus tard, Médiapart dévoile que cette dernière a eu une conversation téléphonique de nature amicale avec Ben Ali.

Michèle Alliot-Marie dénonce alors "une campagne indigne" à son encontre. Après qu'une large partie de l'opposition ait demandé la démission de la ministre, celle-ci s'exécute finalement le 27 février 2011, affirmant néanmoins avoir "le sentiment de n'avoir commis aucun manquement". 

L'affaire Penelope Fillon

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Le 25 février 2017, Le Canard Enchaîné publie le premier article de ce qui deviendra le feuilleton Pénélope Fillon. On y apprend que l'épouse de celui qui est alors un des favoris à l'élection présidentielle, a été rémunérée à hauteur de 500 000 euros en tant qu'attachée parlementaire de son mari et de son suppléant entre 1998 et 2007 et en 2012. De plus, Penelope Fillon a été payée 100 000 euros brut entre 2012 et 2013 en tant que conseillère littéraire à la Revue des deux mondes.

Le Canard Enchaîné insiste sur le fait que ces emplois sont présumés fictifs, ce qui amène le parquet financier à ouvir une enquête préliminaire à l'encontre de François et Penelope Fillon. L'ancien Premier ministre dément alors les accusations portées contre lui et son épouse. Le 14 février 2017, le candidat à la présidence de la République et son épouse sont mis en examen mais François Fillon maintient sa candidature alors qu'il avait préalablement déclaré qu'il se retirerait dans cette circonstance. Il sera éliminé dès le premier tour de l'élection. L'affaire conduira à l'adoption de la loi pour la confiance de la vie politique, votée en août 2017.