La piste d'un seul chien tueur se précise-t-elle autour de la mort d’Elisa Pilarski ?IllustrationAFP
L'étau se resserre autour de Curtis, le chien que promenait Elisa Pilarski le jour de sa mort. Son comportement au chenil pose question et certains émettent des doutes sur son pedigree.
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C’est une des pistes envisagées par les enquêteurs dans la mort d’Elisa Pilarski. Le corps de cette jeune femme de 29 ans a été retrouvé dans une forêt de l’Aisne le samedi 16 novembre. Selon les conclusions de l’autopsie, son décès "a pour origine une hémorragie consécutive à plusieurs morsures de chiens aux membres supérieurs et inférieurs ainsi qu’à la tête". Le pluriel du mot "chiens" signifie-t-il qu’elle a été attaquée par une meute ? Une chasse à courre avait lieu au moment de la mort d’Elisa Pilarski et, très vite, les soupçons se sont tournés vers les chiens de l’équipage.

Elisa Pilarski "victime de son chien Curtis" ?

Selon Christophe Ellul, le compagnon d’Elisa Pilarski, sa compagne a bien été attaquée par une meute de chiens. Dès le début de l’enquête, il a expliqué avoir reçu un appel de sa compagne à 13h19 ce jour-là, lui disant qu’elle était attaquée par plusieurs chiens. Si l’appel a bien pu être authentifié par les enquêteurs, le contenu de ce coup de téléphone est, lui, impossible à vérifier. Au moment de son décès, la jeune femme promenait un de ses cinq chiens, Curtis. Comme l’a expliqué une source judiciaire à l’AFP, citée par Le Point, "les tests ADN pourraient confirmer ce qui apparaît désormais le plus plausible, à savoir que Mme Pilarski a été victime de son chien Curtis".

Présenté un temps comme un American Staffordshire, l’animal serait en réalité issu d’un croisement entre un lévrier whippet et un Patterdale terrier, deux races autorisées en France. Le flou persiste autour du pedigree de Curtis et, comme l’explique l’émission Sept à Huit, il s’agirait en réalité d’un Pitbull, une race interdite d’importation en France. D’après les informations de TF1, Curtis, âgé de deux ans et demi, vient des Pays-Bas, d’un élevage appartenant à une certaine Sharon de Witt. Cette dernière ne répondrait pas aux normes internationales des élevages canins.

Plus étrange encore, Curtis n’est pas enregistré en France : sa puce porte bien le préfixe néerlandais, mais aucun renseignement n’apparaît lorsqu’on rentre son numéro dans l’Icad, l’identification des carnivores domestiques. C’est pourtant une obligation en France. S’agit-il d’un oubli ? Depuis le drame, l’animal se trouve dans un chenil municipal de Beauvais (Oise), au sein d’un box sécurisé. Son comportement pose question.

Curtis, un chien "qui va vous attaquer directement"

Le sort de Curtis a ému de nombreuses personnes et son maître le défend depuis le drame. Pourtant, son chien a mordu à trois reprises depuis la mort d’Elisa Pilarski. Une première fois, quelques heures seulement après le drame, alors qu'un proche de Christophe Ellul était venu s’occuper de lui. Le chien aurait mordu sa laisse et le manteau de cette personne mais cela ne signifie pas qu’il aurait forcément mordu sa maîtresse quelques heures avant. Alors qu’il était interrogé par les gendarmes, Christophe Ellul a, lui aussi, été mordu par son chien, au point de s’écrier, selon un gendarme cité par France 3 : "Il m’a mordu, il faut le faire piquer !". Depuis, il regrette ses propos, tenus alors qu’il venait de vivre un traumatisme.

Christophe Ellul pense que son chien va "devenir fou" dans le refuge où il se trouve depuis trois mois. Les caméras de TF1 ont pu rencontrer la responsable du refuge et voir Curtis dans son enclos. "C’est un animal qui ne va pas vous montrer des signes avant-coureurs, c’est un chien qui va vous attaquer directement, si quelque chose ne lui plaît pas", explique la responsable du refuge. Elle précise qu’aucune des personnes y travaillant ne prend le risque de le manipuler. Curtis a mordu une bénévole seulement cinq jours après son arrivée au refuge, à la fin du mois de novembre.

Selon la responsable, "des chiens qui mordent aussi fort, il y en a peu et, surtout, les chiens qui mordent lâchent. Lui, il ne lâche pas". Interrogé sur cet incident, Christophe Ellul l’explique par l’enfermement du chien et son stress depuis le drame. Il est persuadé que son chien ne peut pas être impliqué dans la mort de sa compagne et entend bien prouver qu'il est innocent. Christophe Ellul a réagi sur Facebook à la diffusion de ce reportage, dans un message posté le 24 février. Il reproche à la responsable du chenil d'avoir laissé entrer les caméras de TF1 : "J'en appelle à Madame la Juge de Soissons et au procureur de la République d'intervenir au plus rapide pour protéger mon chien et le placerdans une structure adaptée avec de vrais professionnels compétents à la prise en charge de chiens traumatisés", écrit-il. Alors qu'il participait à de nombreuses compétitions, Curtis aurait aussi été dressé au mordant, une discipline très réglementée en France.

Curtis a-t-il été dressé au mordant ?

Curtis a participé à des compétitions à l’étranger et notamment, explique TF1, aux Pays-Bas. Interrogé à ce sujet par BFMTV, l’entourage de Christophe Ellul a expliqué qu’il s’agissait de concours de sauts en hauteur et en longueur en Belgique. Pourtant, d’après TF1, Curtis aurait remporté plusieurs médailles lors d’une compétition réservée aux Pitbulls, des chiens interdits d’importation en France. Des vidéos postées sur Facebook par Elisa Pilarski, plusieurs mois avant sa mort, montrent Curtis être entraîné au mordant, une discipline extrêmement réglementée en France.

Comme l’explique TF1, cette technique de dressage est, par exemple, interdite dans la sphère privée. L’arrêté du 26 octobre 2001 précise que, "par activité de dressage au mordant, il faut entendre toute activité destinée à faire mordre ou attaquer, avec ou sans muselière, un chien. Ces activités peuvent se réaliser notamment avec l'aide d'un homme d'attaque ou de tout matériel destiné ou non à cet usage". Les chiens qui peuvent être soumis à ce dressage sont ceux utilisés dans les entreprises ayant une activité de surveillance, de gardiennage ou de transport de fonds. Il s’agit aussi de ceux "pour lesquels la Société centrale canine a délivré une licence (…) permettant d'établir que ce dressage correspond à une épreuve de travail dans le cadre de leur sélection et en vue de leur participation à des compétitions visant à l'amélioration des races", précise l’arrêté. 

Alors que les défenseurs de Curtis et ceux de la chasse à courre continuent de s'invectiver sur les réseaux sociaux, l'enquête se poursuit. Les analyses des prélèvements génétiques, effectués sur 67 chiens, auront bien lieu puisqu'un laboratoire vient d'être sélectionné par la justice. Annoncés pour la fin du mois de février, les résultats très attendus de ces prélèvements ADN ne seront pas connus avant le mois de juin, soit sept mois après la mort d'Elisa Pilarski. En attendant, le procureur de la République de Soissons pourrait s'exprimer d'ici la fin du mois de février.