TÉMOIGNAGE - "À 83 ans, je vis dans une colocation de seniors"(illustration)Istock
Je m'appelle Gilbert Casteras, j'ai 83 ans, et je vis depuis presque deux ans dans la Maison Marguerite, une colocation de seniors située dans le centre de Tence, en Haute-Loire.

Je suis arrivé dans la maison dès l’ouverture, le 1 mai 2016. Ici, tout se passe bien, c’est un endroit très sympathique. Nous habitons à six, quatre femmes et deux hommes. Grâce à notre maîtresse de maison, Marie-Hélène Huard, je ne m’occupe plus de la cuisine et du ménage chaque jour, et c’est un soulagement ! Je possède ma propre chambre avec sa petite salle de bain et un coin dressing. On a même des petits salons entre les chambres pour discuter ou écrire.

Je suis à la retraite depuis 25 ans maintenant. J’ai longtemps travaillé dans la banque, à la BNP Paribas. J’y étais attaché de direction, une sorte de chef de service. Ce poste m’a fait pas mal bouger à travers la France. Je n’ai jamais eu l’occasion, ni l’opportunité d’ailleurs, de me poser et de devenir propriétaire d’un bien quelque part. J’ai vécu dans notre résidence secondaire familiale, qu’on a construite avec mon frère en 1976, près de Tence. On avait deux maisons à côté, c’était bien pour les réunions de famille ou les vacances. Mais avec le temps, les jeunes sont venus de moins en moins et on a fini par vendre les maisons…

Je suis seul, célibataire et sans enfant. J’avais besoin de gérer ma succession. Je ne veux pas causer de soucis aux membres de ma famille après mon départ. Les questions d’héritage, ça pose toujours des problèmes à ceux qui restent. Au moins, maintenant, ma succession est réglée. Je ne serai pas une charge, un poids pour mes neveux et mes nièces, ça me rassure.

Avec l’âge, on a parfois tendance à se laisser aller. C’est un risque que je ne voulais pas prendre. Je suis toujours très actif, notamment dans le secteur associatif de ma commune. Je m’organise, j’ai mes petites habitudes. Tous les jours, je me lève vers 8h, je me prépare et j’enchaîne les activités différentes : je suis par exemple trésorier du club de gym et de danse, je travaille encore un peu à l’office de tourisme intercommunal, j’ai participé à la chorale de l’école de musique, je participe aux animations sur le canton de Tence, en liaison avec les élus… Je suis bien occupé !

Quand je reste à la maison – ça m’arrive quand même - je suis sur l’ordinateur, je tiens mes comptes, je regarde un peu la télé, on joue aux cartes avec les autres colocataires ou on s’occupe du jardin. Il y a deux jours, j’ai même taillé les framboisiers ! L’été, on aime bien boire un coup sur notre terrasse dans le jardin, c’est vraiment très agréable.

L’autonomie est primordiale à mes yeux. Le plus important pour moi, c’est de pouvoir continuer à garder mon indépendance et ma liberté, tant que ma santé le permet. Ici, je suis totalement libre de mes mouvements !

Cette colocation lutte véritablement contre la solitude. On n’est jamais vraiment seul, il y a pratiquement toujours quelqu’un de disponible. On crée du lien social, et c’est important pour se sentir bien. Quand on est âgé, on a besoin de voir du monde ! En maison de retraite, on est dans une structure plutôt stricte, fermée le soir et les personnes présentes sont souvent plus malades que nous... Par ailleurs, financièrement, cette colocation est intéressante car elle est plus accessible. Pour 1500 euros en moyenne par mois, j’ai une chambre, mes repas du midi et du soir et du lien social. C’est tout ce dont j’ai besoin !