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Mercredi midi, le Parlement européen a ratifié le traité de libre-échange entre l'Europe et le Canada, le CETA. Retour sur cet accord commercial qui ne fait pas l'unanimité en Europe.
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Un accord de libre-échange "de nouvelle génération"

Le "Comprehensive Economic and Trade Agreement" (CETA), ou "Accord Economique et Commercial Global" (AECG), vient d’être adopté par les députés européens à Bruxelles. Il s’agit d’un accord de libre-échange dit de "nouvelle génération". Il va en effet plus loin que les accords commerciaux traditionnels qui cherchent à favoriser les échanges et à accéder à un marché de consommateurs de plus en plus élargi. Au-delà de la simple réduction des droits de douanes, il vise aussi la suppression des "barrières non tarifaires" via, par exemple, la mise en place d’une convergence des normes et des certifications entre les deux partenaires et la reconnaissance de 145 des 1 500 appellations géographiques européennes, comme le Jambon Serrano d’Espagne ou la Tomme de Savoie française, sur le sol canadien.

L’UE est le deuxième partenaire commercial du Canada

Si cet accord est aussi important, c’est que le Canada est un partenaire commercial majeur de l’Union européenne, et réciproquement. Le pays d'Amérique du Nord est en effet le 12e partenaire commercial de l’UE tandis que celle-ci est son deuxième partenaire, juste derrière les Etats-Unis. Les volumes d’échange de biens s’élèvent à 60 milliards d’euros par an selon touteleurope.eu. Les enjeux financiers sont donc considérables pour l'un comme pour l'autre.

La Wallonie a failli faire échouer le traité

Le processus de ratification d’un accord bilatéral par l’Union européenne est très complexe. Il requiert d’abord l’approbation des 28 Etats membres sur une version définitive du texte, avant que le Parlement européen le valide par un vote et que le traité soit signé avec le pays partenaire. Or, pour la CETA, une petite région belge de 3,5 millions d’habitants a failli faire annuler l’accord. La Wallonie s’est en effet opposée en octobre 2016 à sa signature, alors que la Belgique avait besoin de l’accord de l'ensemble de ses régions. La venue des représentants canadiens, chargés de parapher l’accord commercial, a même dû être repoussée. Le veto wallon a finalement été levé après d’intenses discussions et le CETA a été signé le 30 octobre 2016.

Les entreprises pourront porter plainte contre les Etats

L’accord bilatéral entre l’Union européenne et le Canada prévoit la création des tribunaux d’arbitrage internationaux chargés de régler les différends entre les Etats et les entreprises, dans le cadre d’un nouveau mécanisme appelé "Investment Court System" (ICS, système juridictionnel des investissements). Dès lors, une multinationale serait en droit de porter plainte contre un Etat dans le cas où une politique publique mise en place irait à l’encontre de ses intérêts. Ce point du traité cristallise l’attention d’une bonne partie des opposants qui craignent que cela favorise les grands lobbies et portent préjudice à certaines politiques environnementales ou sociales des Etats.

Un texte controversé en France et en Europe

Outre la Wallonie, d’autres voix se sont élevées contre ce traité adopté à 408 voix pour, 254 contre et 33 abstentions. Une manifestation anti-CETA avait lieu devant le Parlement européen au moment du vote. Et à l'intérieur, des députés européens écologistes, d’extrême gauche et extrême droite ainsi que des socialistes se sont exprimés contre cet accord.

Le député EELV, Yannick Jadot, candidat à l’élection présidentielle, a déploré le passage d'une "Europe des citoyens et citoyennes" vers "celle des multinationales" à cause des tribunaux d'arbitrage. Marine Le Pen, eurodéputée FN, a, elle, dénoncé un "traité scélérat vis-à-vis des peuples européens" qui "détruira une fois de plus des centaines de milliers d’emplois en Europe, des dizaines de milliers en France" en raison de l’ouverture des marchés européens aux exportations canadiennes, notamment agricoles.

En France, le seul candidat à l’élection présidentielle qui a officiellement exprimé son soutien à l’accord est… Emmanuel Macron !